24 mai 2010
le Grand Prix, Des Hommes et Des Dieux
Cannes 2010 : Le Grand Prix,
Des Hommes et Des Dieux de Xavier Beauvois.
Je ne reviendrai pas sur le Palmarès qui, une fois de plus, m'interpelle quelque part au niveau du vécu. Si je ne m'abuse, Canal + avait organisé un "Palmomètre" ou chaque soir, une dizaine de critiques donnait une appréciation sur les films du jour.
Si je ne m'abuse, donc, le film ayant obtenu la Palme d'Or était le plus mal classé à ce Palmomètre !
Je voudrais profiter de cette médiatisation pour redonner un coup de projecteur sur le film "Des Hommes et des Dieux" et surtout sur l'histoire réelle de ces Moines de Tibéhirine.
Le 26-27 mars 1996 : sept moines trappistes français de l'ordre des Cisterciens de la stricte observance, âgés de 50 à plus de 80 ans, sont enlevés dans la nuit dans leur monastère de Notre-Dame de l'Atlas, à Tibéhirine, dans le fief intégriste de Médéa, à 50 km au sud-ouest d'Alger.
le 18 avril, le chef des Groupes islamiques armés (GIA) Djamel Zitouni revendique l'enlèvement des moines qu'il menace d'égorger. Il propose un échange contre des militants du GIA. Cette revendication est accompagnée de casettes vidéo et audio qui attestent que les moines sont bien au mains du GIA, toujours en bonne santé et dans l'attente de leur libération.
Paris démentira qu'un émissaire se soit rendu auprès des otages, comme le soutiendra par la suite un religieux français.
23 mai : le GIA annonce «avoir tranché la gorge» des otages deux jours auparavant, en justifiant ce massacre par le refus de négociations du gouvernement français.
30 mai : les corps sont retrouvés près de Médéa.
Lors des obsèques célébrées en la Cathédrale d'Alger et dans le cimetière de la communauté, le père supérieur des Cisterciens constate que les corps sont sans tête.
Diverses hypothèses sont avancées mettent en cause le GIA, bien sur, mais également les implications entre les gouvernements algérien et français, les militaires et les services secrets algériens. Mais aucune conclusion n'apparait clairement.
26 février 2004 : le quotidien Le Monde évoque «le mystérieux suicide» du photographe Didier Contant, qui enquêtait sur l'assassinat. Selon des titres francophones de la presse algérienne, il aurait été victime de pressions.
Une bavure de l'armée ?
En juillet 2008, le journal La Stampa reprend l'information publiée dès mars 2006 par John Kiser dans l'ouvrage "Passion pour l'Algérie" (traduction et mise à jour : Henry Quinson) que les sept moines français enlevés auraient été tués depuis un hélicoptère de l'armée algérienne.
Dès mars 2006, John Kiser précise que "d'après une source interrogée à Alger, l'attaché militaire de l'ambassade de France aurait admis que les services de renseignement avaient intercepté une conversation dans laquelle un pilote d'hélicoptère algérien disait : "Zut ! Nous avons tué les moines !".
Début juillet 2009, Le Général François Buchwalter, ancien attaché militaire à l'ambassade d'Alger, rend public son témoignage. Il aurait reçu les confidences d'un officier algérien dès 1996. D'après cet officier les moines auraient été tués par erreur lors d'une opération menée par l'armée algérienne. Celle-ci a mitraillé un camp d'un hélicoptère, pensant qu'il abritait des membres du GIA.
En effectuant une patrouille au sol, elle aurait découvert les corps sans vie des moines. Pour faire croire à un assassinat commis par les terroristes, elle aurait décapité les cadavres des moines. Le gouvernement français d'Alain Juppé aurait été au courant de cette affaire dès 1996 et aurait masqué la vérité à l'opinion publique. Le président Sarkozy a levé le secret défense sur cette affaire. Le général évoque par ailleurs la mort de l'évêque d'Oran, Pierre Claverie.
Fin 2009, la commission consultative du secret de la défense nationale autorise la dé classification de documents détenus par la DCRI.
La sortie du Film et son couronnement au Festival de Cannes permettront ils de soulever définitivement le voile intégral qui masque cette affaire ou cela restera-t-il dans les tréfonds des secrets défenses hélas trop nombreux de part notre vaste monde.
En attendant la vérité, ce film relance au moins
La mémoire des Moines de Tibéhirine !
Obséques en la Catédrale d'Alger.
09:29 Écrit par Pataouete dans Film Théatre, L'Algérie | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : des hommes et des dieux, tibérhine, cannes 2010
22 mai 2010
Hors la Loi ! La polémique ?
Finalement, la "polémique" ne fut qu'un petit pétard mouillé. Et le film "Hors la loi" devrait avoir le succès qu'il semble mériter.
Pourquoi faut-il toujours qu'un livre, un film ou une publication à propos de l'époque "Algérie Française" provoque immédiatement une levée de bouclier de la part d'anciens membres ou sympathisants, de l'OAS, forcément très anciens les membres depuis 50 ans, évidemment accompagné de militant de l'extrême droite assurant nombre et sécurité.
Il est vrai qu'après la seconde guerre mondiale, nombreux furent les films relatant de l'épopée résistante ou Libératrice avant que l'on aborde enfin le coté milicien ou Pétainiste. "Lacombe Lucien" ne fut-il pas le premier ? Le mauvais coté, celui des perdants, fait rarement une bonne histoire. Et, pour ma part, je crois que dans cette affaire, il n'y eu que des perdants.
L'Histoire d'une contrée remonte forcément à l'Homme des Cavernes. Lors de la Conquête française du Maghreb, le territoire national ne comprenait pas toutes les régions actuelles qui composent la France d'aujourd'hui et en particulier les Alpes maritimes d'où est partie la Polémique.
Le territoire de l'Algérie est issu d'une décision de la France. Cette même France qui a intégré ce territoire dans sa souveraineté mais pas ses habitants d'origine. Ces "Indigènes" qui peu à peu se sont soulevés (Sétif 1945) puis rebellés (1954), puis organisés en armée de Libération puis enfin ont obtenus leur indépendance.
Dans Pataouète, j'essaye de développer l'idée qu'un règlement politique de l'affaire algérienne depuis son origine aurait certainement débouché sur une solution plus humaine et sociale.
En prenant le contre-pied de cette intégration totale, les gouvernements de la 3eme République, puis en confiant les pleins pouvoirs de Police à l'Armée, leurs successeurs de la 4eme, n'en on pas voulu ainsi.
Dès lors une guerre civile s'est déclarée ! Et une Guerre, encore plus lorsqu'elle est civile, ce n'est jamais propre. Et les rancœurs envers l'autre coté sont indélébiles.
Il ne peut y avoir, des 2 bords de la Méditerranée, une lumière d'espoir de rapprochement ou d'évocation positive sans que la branche extrémiste, ayant ou pas vécu directement cette époque, ne soulève l'étendard de l'outrance.
Oui, le Film "Hors la Loi" relate l'histoire vue du coté algérien. Mais ses auteurs sont de culture ou de nationalité Franco-Algérienne. Il est toujours nécessaire que chaque partie raconte sa vision de l'Histoire. Je n'ai pas encore vu ce film mais il me semble à l'audition des témoignages entendus que les exactions internes, aux rebelles, et policières y sont largement abordées.
Le Match est terminé, chaque équipe refait le match dans le sens ou elle aurait voulu qu'il se termine. Et si on passait à la troisième mi-temps !
10:12 Écrit par Pataouete dans Film Théatre, L'Algérie | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : hors la loi, algérie, film, fln, oa
13 mai 2010
Putsch d'Alger (13 mai 1958)
Le putsch d'Alger ou coup du 13 mai est le coup d'État mené conjointement à Alger (Algérie française) le 13 mai 1958 par le député d'Alger et officier parachutiste de réserve Pierre Lagaillarde, les généraux Raoul Salan, Edmond Jouhaud, Jean Gracieux, l'amiral Auboyneau avec l'appui de la 10e division parachutiste du général Massu et la complicité active des alliés de Jacques Soustelle.
Dans le contexte de la guerre d'Algérie et d'une lutte pour le pouvoir, il avait pour but d'empêcher la constitution du Gouvernement Pierre Pflimlin et d'imposer un changement de politique allant dans le sens du maintien de l'Algérie française au sein de la République. Il se solda par la fin de la traversée du désert pour le général en retraite, Charles de Gaulle, et son retour aux affaires.
Situation à Paris
SFIO en crise et affaire de Sakiet (Alors que la guerre d'Algérie fait rage, l'armée française subit régulièrement des attaques venant de l'autre côté de la frontière tunisienne. Le pays, devenu une véritable base arrière, apporte en effet son soutien logistique, par le transit des armes, et héberge des troupes de l'Armée de libération nationale. En 1958, le commandement de l'armée française en Algérie décide de ne plus tolérer le harcèlement de ses forces.)
En 1958, la Section française de l'Internationale ouvrière (SFIO), parti de gauche regroupant plusieurs courants socialistes, est au pouvoir depuis la formation du gouvernement Guy Mollet. Sa gestion de la crise de Suez (1956) puis de l'affaire de Sakiet (1957-1958) a créé de graves dissensions en son sein et suscité une crise de confiance entre l'armée et les dirigeants politiques. Au lieu de se résorber, celles-ci vont encore s'accentuer, contribuant à l'affaiblissement de l'autorité parisienne.
Vacance du pouvoir et perspective politique
Suite à la chute du gouvernement Félix Gaillard le 15 avril 1958, le pouvoir républicain est mis entre parenthèse pendant vingt-huit jours. Le trouble ainsi installé dans l'ordre civil permet la prise du pouvoir par la force à Alger le 13 mai. Le détonateur est la perspective du choix de Pierre Pflimlin comme président du Conseil. Pflimlin est partisan de la négociation avec le FLN, ce que refusent les activistes à Alger.
Situation à Alger
La journée du 8 mai et le rejet des bons offices
Le 8 mai a lieu sur le forum d'Alger la commémoration de la victoire de 1945.
Grève générale et hommage aux victimes
Suite à l'assassinat de trois soldats Français par des membres de l'ALN, les Européens se rassemblent auprès du monument aux morts, en signe de protestation contre le terrorisme et en hommage aux victimes.
Coup d'État Prise du gouvernement général
À Alger, deux factions convoitent le pouvoir mis en ballotage par la vacance prolongée du gouvernement depuis 28 jours. Le député poujadiste Lagaillarde et ses activistes du Groupe des Sept sont en rivalité avec les partisans gaullistes. À 18 h Lagaillarde prend l'initiative de prendre d'assaut le gouvernement général, symbole de l'autorité parisienne en Algérie, dont la capitale est alors la deuxième ville de la République. Après le renversement du gouverneur socialiste Robert Lacoste jugé trop modéré par une faction de l'armée, un comité de salut public est constitué.
Comité de salut public
Depuis le balcon du gouvernement général, le général Massu s'adressa à la foule algérienne amassée au pied du bâtiment par le biais de la lecture d'un télégramme officiel s'adressant au président de la République. Il demandait la mise en œuvre d'un « gouvernement de salut public ». Le lendemain, du même balcon, le général Salan, nommé président du comité, précisa la demande d'un nouveau gouvernement par un sonore « Vive de Gaulle ». Léon Delbecque, membre du RPF puis des Républicains sociaux et fidèle du général de Gaulle, devient vice-président du Comité de salut public. Un autre fidèle du général, Lucien Neuwirth, en fait aussi partie.
Réactions aux évènements Gouvernement Pflimlin
En réaction l'assemblée vote la constitution du gouvernement Pflimlin pour rétablir l'autorité républicaine.
Opération Résurrection
Pour accélérer l'agenda législatif et la nomination du gouvernement de salut public, les putschistes à Alger planifient une opération aéroportée en Corse, dernier obstacle avant la métropole.
Sans effusion de sang, l'opération Résurrection débouche sur la création d'un second comité de salut public. La menace d'une nouvelle opération cette fois-ci en métropole, et l'imminence d'un putsch sur Paris incitent à la passation de pouvoirs «au plus illustre des Français» par le président René Coty.
Sortie de crise Gouvernement de salut public
Devant la menace de prise de pouvoir par l'armée après les coups d'Alger et de Corse, René Coty transmit le pouvoir exécutif à de Gaulle le 1er juin 1958. Dans la foulée celui-ci forma un gouvernement provisoire remplaçant le contesté gouvernement Pierre Pflimlin.
07:28 Écrit par Pataouete dans L'Algérie | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : algérie, putsch, 13 mai 1958
12 mai 2010
Teric Boucebci : Le médecin de la mémoire.
Il y a ceux qui creusent les blessures, de l'histoire algérienne et ceux qui veulent les guérir. Teric Boucebci appartient la seconde catégorie. Bien que son, père, le psychiatre Mahfoud Boucebci, protecteur des orphelins, des mères célibataires et de tous les humiliés, ait été assassiné par les ' intégristes le 15 juin 1993, ce jeune homme, thérapeute, criminologue et poète (1), est l'un des rares à délivrer un message d'espoir. Non pas le discours officiel de réconciliation avec les islamistes - «On ne peut pas, dit-il, guérir le Deuil par un décret d'Etat » - mais une vraie parole de solidarité.
Dans la fondation (2) qu'il a créée en hommage à son père, pleuré par 4 000 personnes à ses obsèques, Teric Boucebci soigne les enfants victimes de violences. Il les amène dans la lumière de Tipasa, bouleversé quand les gosses racontent que l'endroit pour eux, se résume à un lieu maudit où se cachaient les terroristes. Mais, émerveillé quand les ados, repris par la beauté des ruines face à la Mer, rassurés par les thérapeutes de la Fondation, se racontent enfin pour la première fois.
Jamais l'essai de Stefan Zweig : "Conscience contre violence", ne lui à semblé si actuel. La polémique sur Camus ? "On assiste en ce moment à un raisonnement d'exclusion. Nous deviendrons adultes le jour où nous accepterons que Camus fasse partie de la terre algérienne, non pas en manipulant la mémoire pour diviser mais en restituant la mémoire collective."
(1) Organisateur d'un des premiers "Printemps des poètes d'Alger"; il a lancé une revue, 12 x 2 Poésie contemporaine des 2 rives, qui publie des auteurs de tous horizons.
(2) fmboucebci@yahoo.fr
07:10 Écrit par Pataouete dans L'Algérie | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : algérie, boucebci, médecin de la mémoire
10 mai 2010
Le "Crime économique"
Suite et fin des extraits d'une série de notes extraites d'un dossier publié dans Marianne de Martine GOZLAN envoyée spéciale à Alger.
Le « crime économique » des intouchables
C'est dit. Et par toute l'Algérie cette fois: de faux combattants dirigeraient le pays depuis 1962. Cette mémoire-là n'enflamme pas seulement les cercles d'intellectuels comme la polémique Camus, mais le petit peuple dans ses profondeurs. Blida, à 40 km de la capitale. Un vieil homme nous attend sur le seuil de sa maison. Le chauffeur de taxi sursaute en le reconnaissant, surpris et respectueux : « Mais c'est M. Mellouk que vous venez voir! Quel courage il a, celui-là! ".
Benyoucef Mellouk, 68 ans, dénonce depuis dix-huit ans le scandale des «faux moudjahidin », anciens agents de l'administration coloniale inscrits sur les listes d'anciens combattants de l'Armée de libération pour toucher indemnités et pensions. Parmi eux, une pléiade de magistrats. Mellouk a été condamné le 22 mars dernier à quatre mois de prison ferme pour divulgation de documents secrets. Il s'est pourvu en cassation, il a l'habitude: « En tout j'ai subi quatre arrestations et deux incarcérations. » Ancien chef du service du contentieux au ministère de la Justice, ce haut fonctionnaire avait été chargé de l'enquête, «pour assainissement », en 1978, avant la mort de Boumediene. Devant les révélations qui mettaient en cause des personnalités du régime, tous> lectuels comme la polémique Camus, mais le petit peuple dans ses profondeurs. Blida, à 40 km de la capitale. Un vieil homme nous att,end sur le seuil de sa maison. Le chauffeur de taxi sursaute en le reconnaissant, surpris et res¬pectueux : « Mais c'est M. Mellouk que vous venez voir! Quel courage il a, celui-là!".
Devant les révélations qui mettaient en cause des personnalités du régime, tous les présidents successifs ont voulu étouffer l'affaire. Sauf Mohamed Boudiaf, durant la brève parenthèse qui fait espérer toute l'Algérie en 1992.« A son arrivée, il appelle le peuple à l'aider à sortir le pays de la corruption, explique Benyoucef Mellouk, je réponds donc présent, en publiant, dans l'Hebdolibéré, 300 dossiers de faux résistants avec leurs noms. Je divulguais un crime économique: ces intouchables avaient trahi l'authenticité de la révolution algérienne. Voilà pourquoi la génération actuelle ne fait confiance ni à ce système ni à sa justice. »
« Au cœur de la lâcheté et de la trahison! »
Mohamed Boudiaf est assassiné le 29 juin 1992. Mellouk est licencié. On lui supprime salaire et droits civiques. Sa fille et son fils sont chassés de l'école publique. La famille survit grâce au salaire de son épouse. Ils tiennent, pourtant. Réunis tous les quatre dans leur maison de Blida, une maison d'autrefois, austère et belle, avec des mosaïques qui courent sur les murs, ils classent et reclassent les centaines de pages du dossier:
, « On était seuls, tous les partis politiques se sont dérobés mais la presse m'a soutenu. » Car c'est l'affaire la plus médiatisée d'Algérie. Elle fascine en mettant le mensonge à nu. Son dernier épisode est une brûlure pour le régime. Le 22 mars, en effet, à l'énoncé du verdict contre Mellouk, des femmes, indignées, ont refait la révolution au tribunal. Et quelles femmes! Les héroïnes de la guerre d'Algérie, celles qu'on appelle les «moudjahidate ». D'abord Djamila Bouhired, pasionaria de la bataille d'Alger, torturée et condamnée à mort, défendue par l'avocat Jacques Vergès, son futur mari, qui écrira avec Georges Arnaud le célèbre Pour Djamila Bouhired, première dénonciation de la torture. Ensuite Fettouma Ouzegane, autre intrépide incarcérée en 1957 et traduite devant la Cour de sûreté de l'Etat. Elles voulaient marcher sur la présidence. On en a dissuadé ces vieilles dames indignes. Alors, elles lancent un appel international pour le condamné.
C'est que «l'affaire Mellouk réveille tout! On est au cœur de la lâcheté et de la trahison! » martèle Fettouma Ouzegane dans son appartement. tapissé de portraits de chahidin, de « martyrs" dont « on a confisqué l'héritage, la révolution ». Des photos de héros dépossédés. Comme dans le local du RCD. Comme dans la tête de tous les Algériens. A 83 ans, elle a gardé l'œil vif et 'l'agilité de la combattante. Elle aussi prépare un livre: 1'Indépendance confisquée. «Je vais tout dire! » jubile-t-elle, tandis qu'en bas, rue Didouche-Mourad, coule le flot de la foule amère qui, à chaque génération, en a trop vu sans rien comprendre. « En 1962, nous les moudjahidates, nous étions jeunes, belles et innocentes. Mais les collabos avaient pris le pouvoir. Les véritables combattants étaient une petite poignée. Boumediene leur a dit : "Vous vous soumettez ou vous vous démettez. C'était la nuit des longs couteaux et elle dure toujours. Les hommes de ce temps avaient étudié dans les pays arabes, ils ont fait le choix d'une Algérie qui ne nous ressemblait pas! »
Décidément, tout craque. Tout s'explique, à tâtons, au fil des souvenirs et des procès. L'opposition, elle-même, est hantée. Loin de se mobiliser sur le chômage et la tragédie de l'éducation, elle se réfugie, comme le régime, dans l'écriture du passé. «Qu'ils cessent d'être des intellectuels pour devenir des politiques capables de rassurer la population! » résume Teric Boucebci. Archives inguérissables de là mémoire algérienne.
Car, près des facultés, attablé chez un de ces marchands de glaces où les jeunes filles commencent à revenir, Farid tempête:« Moi ,j'ai 25 ans et je veux sortir des archives! Vivre et aimer sans que l'histoire nous étouffe! L'Etat a gagné la guerre contre le terrorisme et on a cessé d'avoir peur. Tout ce qu'on lui demande, c'est de nous traiter en citoyens! Votre Camus, qu'est-ce qu'il a dit là- dessus? »
Voilà, la vraie révolution commence. _
Martine Gozlan.
07:04 Écrit par Pataouete dans L'Algérie | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : algérie, printemps des poètes, mellouk