28 mai 2009
Le retour...
Bon d’abord, il faut savoir que les familles rapatriées sont totalement traumatisées, on le serait à moins. On a entassé le maximum de chose dans tout ce qui pouvait contenir : valises, malles, couffins et jusqu’à des couvertures pliées en ballot. L’attente d’un bateau à lieu sur un arrière quai du port, en plein soleil, nous sommes en juillet, des cargos sont réquisitionnés pour répondre aux besoins, ils ne sont pas équipés pour le transport de passagers, ou pour le moins pas suffisamment équipés. Et pour couronner le tout, un mistral à décorner les bœufs balaye toute la méditerranée. Habituellement, 21 heures de traversée là, 33 et dans une ambiance !!!
A l’arrivée à Marseille, un centre de tri, « ma parole on n’est pas des chiens !!! », selon le cas c’est direction une ville de France ou l’on est attendu ou des camps de regroupement, celui de Gémenos est célèbre.
Mais dans quelle ambiance sommes nous accueillit ?
Il faut rappeler que la métropole sort à peine de l’après-guerre. Les conditions de logement, d’équipements sanitaires et ménagers sont précaires. Le gouvernement vient de mettre en place les Plans ZUP mais peu de logement sont prêts et ce n’était pas pour les rapatriés.
Chaque famille a au moins un bidasse qui, s’il n’a pas été blessé ou tué, et rentré complètement traumatisé de 27 mois de service sans compter les rappels.
Chacun a encore en mémoire les menaces de débarquement des Paras sur Paris et les nuits d’angoisse que cela a pu lui procurer.
Nous sommes en plein emploi mais allons nous absorber ces, à la louche, 250 000 demandeurs ?
Et puis, tout ces agents d’état, fonctionnaires, agents de collectivité locale, policiers, gendarmes qu’il va bien falloir réintégrer ne vont-ils pas limiter l’accès des métropolitains au travail et à la fonction publique ?
Les syndicats et les partis politiques de gauche sont très craintifs à cette invasion de « horde fasciste ».
Enfin, est-ce la fierté ibérique ou le bourrage de crane colonialiste qui confère une attitude hautaine pour ne pas dire fanfaronne à ces gens que la France elle a laissé tombé mais qui s’y réfugient ?
11:24 Écrit par Pataouete dans L'Algérie | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : algérie
27 mai 2009
Mais combien sommes-nous ?
Les statistiques démographiques que j’ai pu pécher sont assez troublantes.
En 1900 il y aurait eu 1 million de colons pour 1 million de musulmans. En 1962, toujours 1 million de français d’Algérie pour 10 million d’Algériens. A peine le renouvellement de la population européenne. Est-ce les filles qui finalement n’étaient pas si jolies que cela ou la réputation virile de nos pères surfaite ? Je pense plutôt que cela révèle une amorce de retour au pays, une immigration ralentie, des pertes guerrières, une mortalité infantile forte, (mon père, sur 7 enfants 3 sont devenus adultes, pour moi c’est 2 sur 4), enfin les incertitudes des années 50.
J’ai une petite question qui me taraude, que représente aujourd’hui ce million de personnes ?
Je ne pense pas que nos statisticiens puissent répondre. Nous nous sommes noyés dans la masse, avons marié l’ardéchoise, la parisienne ou la ch’timi. Mes enfants sont déjà des demi-sel, mes petits enfants des quarts.
Autres statistiques, il y avait 3 départements français d’Algérie, avant que le gouvernement ne quadrille plus le territoire. Il y avait, bon an mal an, de 10 à 15 % de français d’Algérie dans les départements d’Alger et de Constantine, prés de 33% à Oran. N’est-ce pas une explication à l’apparente meilleure assimilation des Oranais ? Avec le facteur temps bien entendu, XVIème siècle.
Il y a aujourd’hui 4 million de personnes originaires d’Algérie en France. Lorsque j’ai eu l’occasion professionnelle de fréquenter ces familles, très rares étaient originaires d’Alger. Oran et le bled étaient l’origine quasi absolue. A telle point que le retour au pays est devenu le retour au bled.
Enfin je pensais qu’il ne restait plus de français d’Algérie restés au pays. Je viens de faire quelques recherches généalogiques auprès de l’Archevêché d’Alger. Il y a encore 13 églises sur le diocèse ou une messe est dite toutes les semaines et trois églises à Alger (Cathédrale, Notre dame d’Afrique et St Charles) ou la messe est dite tous les jours. Bien sur cela n’indique pas le nombre d’ouailles présentes, mais cela représente quelque chose.
Je commence à recevoir des témoignages de familles qui sont restées en Algérie après l’indépendance. Leurs témoignages m’intéressent beaucoup. Si cela vous dit, ce serait avec plaisir que je les publierais.
10:00 Écrit par Pataouete dans L'Algérie | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : algérie
26 mai 2009
Dieu que le hasard fait parfois bien les choses.
Dieu que le hasard fait parfois bien les choses.
Je m’apprêtais ce matin à indiquer tous les sites qui m’ont permis de réaliser la première partie de mon pensum. Auparavant, com’d’hab, je dépouille ma boite et je rends une petite visite aux sites des copains et au mien.
Et alors là ! voici ce que j’ai reçu :
Bonjour,
je viens de tomber sur votre blog PATAWET et je tiens à vous féliciter
pour le travail que vous accomplissez. J'apprécie tout particulièrement
la qualité de vos textes, leur ton et l'orientation que vous donnez.
Félicitations aussi pour le contenu historique et le travail de
recherche bibliographique que vous réalisez pour chaque sujet.
Franchement bravo.
J'ai moi-même un site internet et j'ai voulu y mélanger toutes les
personnes originaires d'Algérie sans distinction. C'est un site qui est
fait pour retrouver des connaissances, échanger des photos, des
recettes, ... Je vous laisse le découvrir:
Algérie mes racines
J'y ai aussi des textes d'actualité, des histoires, ... Malheureusement
je n'ai pas assez de temps pour rédiger du contenu et comme vous avez
pu le constater avec votre blog, d'une façon générale les visiteurs
participent peu et réagissent peu. Pour vous rassurer un peu je viens
de jeter un coup d'œil à mes statistiques, mes deux premiers mois j'ai
eu un nombre équivalent au votre. Maintenant, cela me semble dérisoire
comme visites. Effectivement il faut beaucoup plus de visites pour que
votre site commence à s'animer un peu.
Je vais m'abonner à votre flux RSS et au tournant d'un sujet
intéressant je renverrais certainement mes visiteurs vers votre site
pour le faire découvrir. J'avoue que le sujet "Pieds-Noirs qu'es aco?"
me plait particulièrement pour faire un renvoi vers votre site.
Cordialement,
Agnès
Ma parole je suis fier de môa !!!
Lorsque j’ai ouvert ce blog, je savais ou je voulais en venir mais je pensais que le chemin allait être difficile, semé de figuiers de barbarie, et que la « réaction » allait réveiller ces vieilles rancœurs et étriper cet humaniste évoquant les pourquoi plutôt que la fin tragique de l’Algérie française.
Je dois dire que mes surfes passés sur la toile m’avais laissé à penser que le tracé serait laborieux. Le sujet Algérie sur Wikipédia était fermé pour cause de controverse massive, des sites personnels, trouvés au hasard des moteurs étaient souvent de formidable document sur la période française avec des recueils de photos vastes, j’avais parfois apporté ma contribution, mais dès que l’on abordait la fin de l’histoire c’était yéma yéma !
Aujourd’hui, je dois dire que je suis beaucoup plus optimiste. Si vous souhaitez approfondir vos réflexions ou rechercher des documents je vous propose :
Wikipédia-Algérie : Comme vous le savez Wikipédia est une auberge espagnole, on y mange ce que l’on y apporte mais désormais, le sujet est vaste, bien illustré, bien détaillé et sans controverse.
Alger-Algéroisement : beaucoup de photos sur Alger et l’Algérois.
Alger-Roi : c’est de ce site dont je parlais plus haut. Formidable recueil de Photos sur Alger et toutes les communes de l’Algérois ce travail est remarquable mais, les commentaires ou textes …
Bains-Romains : Souvenirs plus limités à ce secteur mais c’est là que j’ai trouvé mes photos de plage.
Gazette de Là-bas : Un peu trop là-bas mais anciennes photos intéressantes.
Et puis, le petit dernier :
Algérie mes racines : dont je parle plus haut.
Sinon des sites plus officiels :
Sinon, faites comme moi fouillez la toile ou continuez à me lire régulièrement.
Mais vous pouvez aussi m'envoyer vos témoignages je me ferais un plaisir de les publier.
13:55 Écrit par Pataouete dans L'Algérie | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : algérie, alger
25 mai 2009
Une main devant, une main derrière !
Alors, nous en arrivons aujourd’hui à l’expression qui m’irrite le plus au monde !
Une main devant, une main derrière !
Je ne peux pas évoquer ma terre d’origine sans que l’on me réponde : « Une main devant une main derrière ».
Bien sur, si l’on évoque la spoliation de sa terre, dont nous étions depuis plusieurs générations, de ses souvenirs, de ses cimetières, de ses propriétés et souvent de son mobilier, bien sur les rapatriés ont tout laissé.
Mais si l’on évoque l’aspect du patrimoine financier, vous pensez bien que les riches, ceux dont la famille avait amassé un patrimoine conséquent, avaient déjà depuis des années préparé leurs arrières en métropole, en Israël, aux Amériques, ou ailleurs.
Par contre les classes laborieuses, sans doute plus équipées que le métropolitain, en électroménager par exemple, n’ont pu emporter plus que ce qu’ils possédaient.
Je ne veux pas, à nouveau, en remettre une couche sur ce colonialisme de peuplement, mais ce petit peuple de français d’Algérie n’a-t-il pas plus pâti des décisions politiques, des coups d’état et des actions militaires, et pour finir, par le déclenchement de l’insurrection militaro-fasciste, qui s’appuyant sur la jeunesse et la pègre a développé une situation de guerre civile aveugle, fratricide et assassine.
Oui, en 1962, les attentats, les exécutions sommaires, la politique de la terre brulée, les rumeurs de valise ou de cercueil, oui tout cela a impliqué un exode massif, immédiat et donc inorganisé des français d’Algérie.
Même la plupart des familles des militants anticolonialistes, les militants eux-mêmes, s’ils n’avaient pas été assassinés, étaient réfugiés en métropole, sont parti pour « voir » avant d’y retourner.
Lorsque nous sommes retournés à Alger nous avons retrouvés des voisins, bien sur pas impliqués dans l’OAS, qui étaient restés sur place et qui n’avaient pas été inquiétés. Je reparlerais plus tard de cette époque.
Je reparlerais également de la situation des métropolitains au moment de cet exode et de l’accueil réservé aux rapatriés, qui ont certainement aussi contribué à ces lamentations. Mais il me faut rappeler que les rapatriés ont été indemnisés ! Bien sur, pas à la hauteur de leurs pertes morales mais en fonction de leurs ressources déclarés les années précédentes.
Il est toujours difficile de réécrire l’histoire. Mais, que serait devenue l’Algérie avec une autre politique d’intégration, une autre politique militaire, sans intervention extérieure des 2 blocs qui s’affrontaient à l’époque, Je ne suis pas capable d’imaginer l’histoire des français d’Algérie mais j’affirme que le peuple habitant l’Algérie aurait certainement été plus heureux.
11:07 Écrit par Pataouete dans L'Algérie | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : algérie
23 mai 2009
Les Mahonnais
La plupart de mes aïeux sont originaires de France. La seule qui venait d’ailleurs était une petite fille de 5 ans venue bien sur avec ses parents. En fait c’est le mari d’une des descendante de sa sœur, qui m’a contacté par généalogie.com et ma raconté l’histoire telle qu’il avait pu la reconstituer. C’est donc Maria Caules, aïeule à la 6éme génération, et Fortuny Bartolomeo, qui émigrèrent en 1850 avec leur fille Lucia, née à Alayor sur l’ile de Minorque, J’ai eu envie de présenter un Texte de Jean-Jacques Jordi trouvé sur le site : Algéroisement votre.
L'histoire des populations d'origine européenne en Algérie est chose récente et les premiers éléments dont nous disposons permettent par delà l’opposition des historiographies « colonialiste » ou « anticolonialistes », d'affirmer que la population « française » d'Algérie est la résultante d'apports très divers et d'un mélange de populations.
Parmi ces apports, nous distinguons les migrations organisées par l'Etat Français, concernant l'Europe du Nord-est principalement les Allemands et les Suisses, avec naturellement les populations métropolitaines :
Alsaciens-Lorrains, Parisiens, Languedociens, Corses
et les migrations tolérées d'origine euro-méditerranéennes, c'est-à-dire les Espagnoles, les Italiens, et les Maltais qui débarquent en terre africaine sans être officiellement appelés par les autorités françaises.
Cependant cette dernière population échappe au système défini : Les " Mahonnais ".
Les Mahonnais
Par "Mahonnais", nous entendons dans leur ensemble, les émigrants de l'île de Minorque, car tel était le terme générique que leur donnais les Français. Les conditions de la venue des Mahonnais en Algérie tiennent à un faisceau de facteurs parmi lesquels il convient d'en extraire trois principaux :
- L'île de Minorque est entrée dans une phase de dépression économique dès 1810, aggravée par des accidents climatiques et par une attitude royale espagnole désastreuse.
Misère et inoccupation sont les deux caractéristiques de l'île.
- L'entreprise française de 1830 en Algérie passe par les Baléares et surtout par Mahon.
En faisant de l'île de Minorque leur base d'intendance, leur hôpital pendant plusieurs années, les français relancent certes une économie insulaire importante, mais leur départ à la fin des années 1830 replonge l'île dans sa torpeur économique.
Cependant, les militaires français vont apprécier une population honnête et travailleuse, et se rendre compte du bénéfice que l'on peut tirer de sa venue en Algérie.
- Comme le dit justement E. Violard :
" Les Mahonnais furent attirés en Algérie au lendemain de la conquête.
Leur arrivée fut joyeusement saluée par l'armée d'occupation qui fut peu de temps après
abondamment pourvue de légumes frais et variés ".
Pour autant, leur venue en terre africaine ne s'est pas faite de façon régulière et nous déterminons deux flux migratoires bien distincts :
- la migration "spontanée" entre 1830 et 1835.
La migration organisée par le Baron de Vialar à partir de 1835 - 1836.
De 1830 à 1835, se produisent d'incessants échanges entre Minorque et Alger principalement.
Le Moniteur Algérien en souligne très régulièrement le trafique maritime, et en 1834, Alger possède sa rue de Mahon.
En règle générale, la migration comporte plus d'homme que de femmes les retours dans l'île sont fréquents. L'objectif est naturellement de trouver un travail pour quelques mois et repartir.
Ainsi en mars 1832, 2000 Mahonnais débarquent à Alger en quête d'un travail.
Le premier recensement des européens de la ville effectuer en 1833 fait apparaître :
689 Anglo-maltais,
671 Italiens
et
781 Mahonnais (et non pas Espagnols)
Ces derniers travaillent essentiellement sur le port ou dans la reconstruction des bâtiments.
Le second chapitre qui s'ouvre aussitôt dès la fin de 1835, est fort différent.
C'est le réseau du Baron de Vialar. Rien ne destinait Antoine - Etienne Augustin de Vialar à tenter l'aventure en Algérie.
Quand la révolution de 1830 éclate, ce procureur du roi Charles X, et propriétaire terrien dans le Tarn, démissionne et décide de partir en Egypte.
Faisant escale à Alger en 1832, le jeune aristocrate est séduit par la nature algérienne et s'y établit.
Il se porte acquéreur de plusieurs propriétés et apparaît aux yeux de tous comme un véritable pionnier de la colonisation libre. En 1835, la Société Coloniale le charge de se rendre à Paris pour y défendre la colonisation "en gants blancs".
Son bateau pris dans une tempête, fait route vers Mahon où il rencontre une ancienne connaissance, Don Costa secrétaire à la police du gouverneur de l'île. Ensemble, ils conçoivent l'idée d'une organisation d'un réseau d'émigration vers l'Algérie dans des modalités fort simples
Amarrées sur la jetée nord, ces balancelles dont l'une portait le nom évocateur de
" Espéranza ",
assuraient de nombreuses rotations entre Alger et Minorque.
Don Costa se chargeait de recruter les familles et s'assurait que le gouvernement espagnol n'y mettrait aucune obstacle. De son coté Vialar s'occupait du transport et du travail. Le réseau fonctionna de suite, et dès mars 1836, nous constatons une nette accélération de mouvement migratoire "Mahonnais".
(les villages les plus touchés étaient Condadela, Mercadal, San-Luis, et Mahon ).
En septembre de la même année, Le Moniteur Algérien souligne que :
"Quant à l’accroissement de la population européenne, nous pouvons affirmer que le nombre des Mahonnais venus depuis peu dépasse à lui seul le chiffre de 1.600 personnes... Ni le travail, ni la terre ne sont près de leur manquer en Algérie".
Cette deuxième vague migratoire est essentiellement familiale, massive, encouragée, et destinée avant tout au travail de la terre. Ce faisant, elle devenait quasi définitive et l'accueil des familles fut généralement très chaleureux. Le réseau mis en place par de Vialar servit à d'autres colons comme de Tonnac, Lermercier, Saussure .... Et il fonctionna jusqu'à la fin des années 1840, date à laquelle la migration minorquine se tarit autant par un appel qui ne se fait plus :
- crise économique et financière en Algérie.
- fin de la colonisation en "gants blancs".
- frein mis à l'émigration minorquine par le gouvernement espagnol
(devant les risques de désertification de l'île).
Nous avons retrouvé des Mahonnais partout en Algérie, de Bône à Oran, mais ce sont les alentours d'Alger, zone de leur première installation, qui en accueillent le plus grand nombre avec Hussein-Dey et surtout Fort de l'Eau comme pépinière.
D'ailleurs, Fort de l'Eau et Mahonnais sont étroitement imbriqués au point que ça en devient une redondance.
Fort de l'Eau est un ancien site d'occupation humaine puisque son occupation débute en 1556.
En 1830, les terres alentours formant le domaine de la Rassauta sont propriétés de la tribu des Aribs.
Il faut dire que ce vaste domaine sur plus de 4.000 hectares comprenait cinq grandes fermes et plusieurs petites fermes, ce qui excita la convoitise de nombre de spéculateurs.
Le domaine fut attribué à un aristocrate polonais, le prince de Mir-Mirsky en juin 1835 qui n'en fit rien, puis à un espagnol, le comte del Valle de San Juan en 1844 qui ne fit pas mieux. Par deux fois la colonisation de la Rassauta par des intérêts privés se solda par l'échec. C'est alors que le ministère de la Guerre décida en avril 1846 la création d'un centre de population, et l'ayant appris, une cinquantaine de familles mahonnaises, placées sous la protection du baron de Vialar, adressait une requête afin d'obtenir les concessions du centre.
Elles reçurent une réponse très favorable du Ministère lui-même qui enjoignait Bugeaud à faire le nécessaire :
"Cette demande mérite une sérieuse considération : Les Mahonnais font généralement d'excellents colons. Ils sont très entendus dans la petite culture et leurs habitudes de travail, d'économie et de sobriété les font presque toujours réussir.
C'est une des populations les plus actives et les plus utiles d'Algérie : ce sont les Mahonnais qui ont cultivé presque tous les terrains du massif d'Alger et ils approvisionnent pour ainsi dire à eux seuls de légumes et de fruits les marchés de la ville".
Bugeaud admet le principe d'un village Mahonnais, le terme est officiel, Fort de l'Eau. Le 25 juillet 1849, le préfet d'Alger nous apprend, dans une lettre adressée au Gouverneur Général que 45 familles mahonnaises sous la direction de Mathieu Marques, Juan Fooelich et Juan Barbe, ont été installées dans leurs concessions sans subventions, crise économique oblige.
Et le préfet de conclure : "il est impossible d'établir un village dans des conditions plus économiques"
En effet, l'administration déboursa 7.000 francs pour le village mahonnais contre 40.000 à 45.000 francs pour les autres villages crées en même temps. C'est de Fort de l'Eau que partirent d'autres Mahonnais vers la partie orientale côtière d'Alger.
A Rouiba, Ain Taya, Réghaïa, l'Alma, le Fondouck, le Cap Matifou, Ain Béïda, etc., nous relevons un grand nombre de concessionnaires Mahonnais.
Les autorités françaises d'Algérie étaient fort satisfaites des Mahonnais. Regroupés, les Mahonnais paraissaient vouloir vivre une vie spécifiquement " mahonnaise" la conception de l'habitat, le Mahonnais construit de suite une maison propre et naturellement passée au lait de chaux , les coutumes, les marques de la vie sociale, l'endogamie, le code moral dont ils s'entourent.. La conception familiale et l'attachement à la terre étaient des éléments correspondant exactement à l'attente du gouvernement français pour l'Algérie.
Ce que la politique coloniale n’avait pas réussi à faire à cette époque avec les Français, elle le réussira avec les mahonnais.
Sobres, travailleurs efficaces et économes, habiles en agriculture, ne se mêlant pas de politique générale, dédaignant assistance et bienfaisance, ayant la réputation, sinon d'être avares, du moins prés de leurs modestes biens, les mahonnais entraient parfaitement dans le cadre défini par la colonisation française.
Ce qui permis la venue des Mahonnais fut un travail sur et rémunéré. Ce qui rendit durable leur installation fut l'obtention de concessions modestes certes, mais suffisantes pour envisager une promotion sociale. Les Mahonnais furent d'emblée considérés comme des artisans de la colonisation reconnus de tous.
Leurs non renouvellement par de nouveaux apports de l'île (même si des Majorquins et des Ibiziens vinrent s'installer et les relayer quelque peu) en faisaient une communauté euro-algérienne et les liens avec la société d'origine s'étaient fort distendus. Nous pouvons parler d'une rapide insertion dans le monde colonial, d'une acculturation et d'une assimilation véritable dès la fin du XIX ème Siècle rendues possible par l'école française (ils y tenaient fermement), le coude à coude quotidien et la francisation des populations européennes par Paris en 1889.
En 1925-1926, E. Violard nous affirme que nous devons la merveilleuse colonisation, l'opulente culture qui s'étend de Mustapha jusqu'à la Régahaïa sur plus de 40 kilomètres aux Mahonnais. A cette époque, nous recensons dans les villages de cette plaine orientale-côtière 3.660 Français d'origine mahonnaises et 30.180 Français d’autres origines !
Le 31 mai 1952, Fort de l'Eau fêtait son centenaire et invitait les personnalités de Minorque à participer aux festivités, mais dix ans plus tard, tous se disaient rapatriés en métropole française, ce qui sans doute correspondait à tous sentiments profonds et à la logique de l'histoire de la France en Algérie.
La place manque ici pour étudier les marques de la société mahonnaise et nous prions tous les :
Pons, Sintès, Mercadal, Lorens, Ségui, Fedelich, Oliver, Gener, Juanéda, Tuduri, Alizina, Camps, Coll, Bertomeu, Bagur, .....
Sans oublier Fortuny et Caules mes aïeux.
et bien d'autres encore, de nous excuser de ne pas le faire.
08:06 Écrit par Pataouete dans L'Algérie | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : algérie, mahonnais