24 février 2010
La Délicate Essence du Socialisme.
Mort du « vieux socialisme » ?
La question peut surprendre, elle se trouve pourtant au cœur de l'excellent livre de Philippe Chanial, la "Délicate Essence du socialisme".
La réponse est négative, selon lui. D'ailleurs, avons-nous besoin d'idées neuves dans ce domaine? Le divorce entre !e socialisme originel et celui d'aujourd'hui est peut-être consommé pour certains, il ne l'est pas pour ce jeune sociologue et quantité de « sentimentaux ». Le « socialisme sentimental» n'a pas disparu avec l'avènement du «socialisme scientifique » de Marx et Engels. Il aura fallu que le communisme disparaisse pour que le socialisme français, après avoir échoué le 21 avril 2002, redevienne, sous la plume d'auteurs persévérants, un sujet d'étude, et une source d'inspiration. Tel est le cas de Philippe Chanial, qui connaît sur le bout des doigts la portée du socialisme originel et de sa descendance, aussi bien chez Pierre Leroux (1797-1871) que chez Jean Jaurès ou John Dewey (1859.1952).
Philippe Chanial connait sur le bout des doigts la portée du socialisme originel.
Car ce n'est pas un hasard si le socialisme "associationniste" hante à nouveau les esprits. ; les auteurs qui cherchent à redonner vie au projet socialiste se situent souvent à la marge des ténors de la gauche de gouvernement. Vincent Peillon les encourage, l'économiste Jacques Généreux, qui a rejoint le Front de gauche; les apprécie, mais ils doivent renverser les murailles de l'indifférence en travaillant comme des forcenés.
Philippe Chanial s'applique à renouer avec la morale socialiste des pères fondateurs. Il nous rappelle que l'abbé Sieyès (1748-1836) a longtemps hésité à nommer l'art social, cette science politique nouvelle fille de la Révolution. « Socionomie»?« Sociocratie »? « Sociologie»? « Socialisme» ? Tous ces mots sont attestés; le dernier, parait-il, surgit sous sa plume vers 1780. De même, l'expression d'« intérêt social» serait de Beccaria (1738-1794) qui cherchait à remplacer celle d'intérêt de salut. Car c'est bien un nouveau langage qui naît avec le socialisme primitif. Le langage de la société, du sodus, en latin, du compagnon. Faire société, coopérer, pour les premiers socialistes, c'est contribuer à la qualité des liens qui unissent les hommes entre eux.
La sociabilité est donc un sentiment moral avant d'être une idée. Ce socialisme moral s'ébauche au lendemain de la Révolution. Jaurès et Mauss (1872-1950) en seront les héritiers. Son ambition est de forger une nouvelle synthèse entre amour de soi et amour des autres. Chanial décortique ce socialisme républicain avec une foi certaine. Douce époque où le progrès de l'humanité s'identifie au progrès non interrompu de l'association. On est loin du grand récit libéral de l'individu se libérant du joug de la société. Il faut alors, selon Chanial, inverser la formule:« Libéral n'est-il pas d'abord celui capable de libéralité, celui capable de donner? » A ce titre, il peut aussi renouer avec la tradition du socialisme républicain.
Qui s'en plaindra?
Ce texte est une "Pensée Libre" de Philippe Petit parue dans Mariannen° 669.
"La Délicate Essence du socialisme".
L'association, l'individu et la République,
de Philippe Chanial Le Bord de l'eau.
07:17 Écrit par Pataouete dans La poulitique, Livre | Lien permanent | Commentaires (18) | Tags : vieux socialisme, chanial, délicate essence