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24 novembre 2010

La Semaine des Barricades

La semaine des barricades désigne les journées insurrectionnelles qui se sont déroulée du 24 janvier au 1 février 1960 à Alger durant la Guerre d'Algérie (1954-1962). Son instigateur Pierre Lagaillarde (28 ans) député d'Alger (et ex-parachutiste) ainsi que ses acolytes Joseph Ortiz (47 ans), patron du bar algérois le Forum, et Robert Martel (42 ans), agriculteur de la Mitidja, organisent une manifestation au cours de laquelle une partie de la population algérienne d'origine européenne et musulmane manifeste son mécontentement face à la mutation en métropole du général Massu, le 19 janvier 1960, sur décision du président Charles de Gaulle. Des barricades sont dressées rue Michelet et rue Charles Péguy.

Lors de son discours du 16 septembre 1959, le général de Gaulle évoque le « droit des Algériens à l'autodétermination » et propose trois solutions : sécession, francisation ou association. Qu'une solution autre que française soit envisagée au conflit qui dure depuis 5 ans est jugé inacceptable aussi bien par la population française d'Algérie, que par beaucoup de militaires d'active.

L'affaire Massu

Le 18 janvier 1960 lors d'une entrevue accordée à Hans Ulrich Kempski, journaliste au quotidien ouest-allemand Süddeutsche Zeitung, le général parachutiste Massu, «héros local» de la Bataille d'Alger (1957) et du Putsch d'Alger (1958), a commis une enfreinte envers le devoir de réserve lié à sa profession et un « crime de lèse-majesté » envers le chef de l'Etat; ce qui lui a valu son départ d'Algérie.

Les circonstances de cette mutation sont directement liées à un passage équivoque paru dans le journal allemand où l'officier émet son scepticisme quant à la conduite des affaires algériennes par l'Élysée : « De Gaulle était le seul homme à notre disposition. Peut-être l'armée a-t-elle fait une erreur ». Bien que Massu ait toujours contesté avoir tenu de tels propos, l'article est paru dans la presse internationale et Paris a mis en doute sa loyauté ce qui a entraîné son rapatriement immédiat en métropole.

En fait, cette mutation rendit un fier service à Massu puisqu'elle l'éloigna du secteur algérien et lui évita de sombrer dans la félonie dont furent accusé et condamné ses acolytes de mai 58 dont il était le chef. De Gaulle ne semble pas lui en avoir tenu rigueur puisque c'est vers lui qu'il se tourna en mai 68 pour se faire "remonter les brettelles".

Chronologie des journées insurrectionnelles

Dimanche 24 janvier

 

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La manifestation débute à Alger le 24 janvier, mais il s'avère que les membres de l'armée française ne s'associeront pas à un mouvement insurrectionnel. Le Général Challe prévient les insurgés qu'il fera tirer si la Délégation générale (ex Gouvernement Général) est investie. Joseph Ortiz décide alors de se replier dans le bâtiment de la Compagnie algérienne, au balcon duquel il prononcera un discours de ralliement à la population « L'Algérie doit choisir, être française ou mourir ».

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Il fait dresser des barricades autour, gardées par des hommes en armes, membres de son mouvement, le Front national français, ou bien des Unités Territoriales, réservistes participant par roulement au maintien de l'ordre. Pierre Lagaillarde fait de même à l'Université, quartier des facultés, où il établit son poste de commandement surnommé « Alcazar ».

Vers 18 heures, les gendarmes mobiles et les CRS reçoivent l'ordre de faire évacuer les manifestants. Un coup de feu est tiré déclenchant une fusillade nourrie. Les parachutistes tardent à s'interposer.

Le bilan est lourd. 14 gendarmes sont tués, ainsi que 6 manifestants. Il y a environ 150 blessés.

Lundi 25 janvier

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Le lundi 25 janvier, le délégué général Paul Delouvrier et le chef des armées en Algérie, le général Challe sont en position difficile. Si l'armée ne s'est pas ralliée aux insurgés, Challe sait qu'une partie importante de ses subordonnés leur est favorable et qu'il ne peut donner l'ordre de tirer.

Michel Debré, premier ministre, et Pierre Guillaumat, ministre des Armées, se rendent à Alger et réalisent la gravité de la situation. Le colonel Antoine Argoud leur annonce que, si de Gaulle ne veut pas renoncer à l'autodétermination, « les colonels se chargeront de l'y contraindre ». La pression d'Argoud sur Delouvrier se poursuivra dans la journée du 26 janvier. Paul Delouvrier décide alors de fuir Alger. Il convainc le général Challe de se replier avec lui. Auparavant, Delouvrier enregistre un discours appelant la population à la raison. Il y propose également le pardon à Ortiz et Lagaillarde, ce qui lui sera reproché par Paris.

Jeudi 28 janvier

Delouvrier et Challe se rendent le 28 janvier à la base aérienne de Reghaïa et y installent leur nouveau quartier général.

Vendredi 29 janvier

Le président Charles de Gaulle (en uniforme de général) fait une allocution télévisée. Il appelle l'armée à ne pas se joindre aux insurgés, qu'il condamne.

Samedi 30 janvier

Le discours du président, ainsi que celui de Delouvrier portent leur fruit, aussi bien auprès des soldats que des membres des Unités Territoriales dont la plupart des membres abandonnent peu à peu les barricades. Seuls les plus déterminés poursuivent le mouvement.

Dimanche 31 janvier

Des négociations sont menées pendant toute la journée du dimanche 31 pour obtenir la reddition des insurgés. Joseph Ortiz s'enfuit dans la nuit du dimanche au lundi.

Lundi 1 février

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Pierre Lagaillarde, dans son uniforme de sous-officier parachutiste de réserve («tenue Léopard »),durant la semaine des barricades.

Le 1er février, Pierre Lagaillarde et ses partisans organisés en colonne, se rendent aux parachutistes du 1er REP qui leur rendent les honneurs militaires.

Conséquences

Le bilan fait état d'environ une vingtaine de morts et 150 blessés.

Cette semaine marque une escalade des partisans de l'Algérie française. Elle s'inscrit à la suite de la journée du 13 mai 1958 et préfigure la tentative de coup d'État du 22 avril 1961. La répression est sévère : Les Unités Territoriales créées en 1955 sont dissoutes à l'issue de cette insurrection ainsi que les 5è bureaux. Les volontaires peuvent s'engager dans le Commando Alcazar du 1er REP qui est spécialement créé.

Elle est également le symbole d'une fracture entre Français : d'un côté les Français de métropole las de cette guerre et qui soutiennent la proposition d'autodétermination du président de Gaulle, et d'autre part, les Français d'Algérie qui se sentent trahis et abandonnés.

Elle montre aussi le trouble qui sévit dans l'armée, celle-ci se divisant entre allégeance au gouvernement légal de Paris et soutien à la population française d'Algérie. Le Général Challe, qui venait d'obtenir la victoire sur le terrain est limogé.

Les meneurs sont arrêtés et emprisonnés et jugés par un tribunal militaire en Métropole. Le procès dit « des Barricades » se tient à Paris au mois de novembre 1960. Les accusés Pierre Lagaillarde et Joseph Ortiz, mis en liberté provisoire pour la durée du procès, s'enfuient à Madrid, Espagne où ils fondent l'OAS en décembre.

Tous deux sont jugés par contumace mais bénéficient de l'amnistie présidentielle en 1968.

Il faut aussi constater, sur le diaporama ci-joint que j'essaye vous proposer que, cette fois encore, les foulles qui rejoignent la rue Michelet sont très "Bigarées". De nombreux indigénes accompagnent les européens, anciens combattants, fonctionnaires de l'administration française ou ouvriers agricoles entrainés par leur Patron ?

En tout cas ils sont nombreux sur les photos et triste retournement de l'histoire ils figureront très certainement parmis les victimes de l'OAS.

Autre petite remarque, il faut dire que c'était l'hiver et qu'il pleuvait, les femmes européennes portent trés souvent un foulard qui n'a rien d'islamique...

souvenirs_barricades.pps


07:15 Écrit par Pataouete dans L'Algérie | Lien permanent | Commentaires (17) | Tags : algérie, barricades, massu, lagaillarde

Commentaires

ah les barricades : un manque pour beaucoup de personnes !
moi ça va, je ne les regrette, ni ne les souhaite à nouveau.
Par contre à propos de ta "remarque finale" : c'est bien ce que je dis depuis le début, une femme avec un foulard c'est "sexe" si c'est un "carré....", de la même façon qu'un "chapeau" couvre chef (d'une autre religion...) est considéré comme "classe" !
l'unanimité dépend toujours et encore d'un petit pourcentage !
Sur ce !! bon mercredi...
qui a dit que je "digresse" ? hein !!
Yves : bises à Madame !
;-D

Écrit par : D | 24 novembre 2010

Ces barricades là je ne les regrette pas, bien au contraire !

Écrit par : Z'Yves | 24 novembre 2010

@ La douleur et le chaos.


Je me demande pourquoi j'ai souvenir de ces journées de 1960 et bien c'est simple j'étais en CM2 et je n'étais pas encore en école préparatoire donc encore à la maison.On a vu beaucoup d'images à cette époque où nous étions à Paris.Surtout celle de Lagaillarde qui n'était (et ce n'est pas péjoratif) que Sergent si je me souviens bien ,le premier grade des Sous-Officiers.

Je pense trés sincérement que le Général voulait une sorte d'association une sorte d'Algérie autonome au sein de la Communauté française et peut-être bien avant 58 dans sa traversée du désert à Colombey.

Le General Massu a pris les Forces françaises en Allemagne que l'on appelait F.F.A.Le PC à Baden et c'était en fin de compte un Corps d'Armée bien muusclé.Quand j'ai passé la frontière allemande en décembre 1967, pour une affectation à Zweibrücken, et bien c'etait notre grand patron.

A Paris dans les manifestations les mots étaient durs pour mes oreilles et mes yeux d'enfants.J'ai entendu:"De Gaulle à la poubelle,Massu par dessus" et aussi :"Le fascisme ne passerra pas" etc...etc...

Pierre

Écrit par : Ulm Pierre | 24 novembre 2010

Il était Sous-Lieutenant,le deuxième grade dans la hierarchie des Officiers subalternes si on compte bien sûr le grade d'Aspirant.Donc il n'était pas Sergent mais bien Sous-Lieutenant ,en tout cas au moment des barricades il était réserviste.

Pierre

Écrit par : Ulm Pierre | 24 novembre 2010

Je me souviens aussi...""Le fascisme ne passerra pas"...moi, j'avais 16 ans, et cette année là, j'étais venue à Alger

Yves, tu as vu qu'il y a des vidéos sur dailymotion, " les barricades 24janvier 1960" ?

Écrit par : noelle | 24 novembre 2010

Ah ! que je suis content de ces commentaires-témoignages.
Pour ma part, j'habitais à quelques mètres en dessous du tunnel des facultés donc, sous les barricades et ma famille s'opposait à la tournure des évènements. Donc effectivement Pierre : terreur et chaos.
Pour Pierre Lagaillarde, selon les sources il était officier ou sous-officier de réserve, en tout cas, il était Député d'Alger.
Pierre, tu pense peut-être au Capitaine Sergent.
"Le Fascisme ne passera pas " était effectivement le leitmotiv des manifestations en Métropole, même à propos de De Gaulle pendant la 4eme.
Comment qualifier autrement des coups d'État militaires ?

Noëlle : oui je les ais toutes visionné mais elle faisait toute une apologie de l'Algérie Française que je ne veux pas voir figurer dans ce Blog !
J'ai préféré vous proposer le montage vidéo qui propose les mêmes photos mais sans commentaires.

Écrit par : Z'Yves | 24 novembre 2010

En ce qui concerne le Général Massu, héros de la Bataille d'Alger et président du comité de salut public en 1958.
Ce retrait d'Algérie dont les conditions mériteraient de profondes recherches. En tout cas, il a permis à Massu de sortir du Merdier algériens, de poursuivre une brillante carrière au commandement des forces françaises en Allemagne, et surtout de suivre le chemin félon de ses partenaires de 58.
Mais cela c'est d'autres thèmes qui seront bientôt abordés.

Écrit par : Pataouète | 24 novembre 2010

Oui ,je voulais le rajouter sur mon commentaire pour dire que le Commandement des Forces françaises en Allemagne du 2° Corps d'Armée (2° CA) était un bon Commandement.L'idéologie finale si je peux m'exprimer ainsi et bien était de ralentir une éventuelle progression ou attaque des Forces du Pacte de Varsovie,en tout cas faire tampon dans ce secteur réservé aux Forces françaises, c'est pourquoi ce 2° Corps d'Armée,dont je faisais parti,était composé de deux Divisions blindées avec des Commandements bien sur.

Le Général de Gaulle ira à Baden-Baden en mai 68.

Non je ne confonds pas avec le Capitaine Sergent mais ce Lagaillarde m'a marqué à 11 ans par les images télévisées.Il a du faire un peloton pour être Sous-Lieutenant.

Pierre

Écrit par : Ulm Pierre | 24 novembre 2010

Oui Lagaillarde était le personnage symbolique de ces barricades. Toujours en tenue de camouflage parachutiste mais sans insigne ni galons. Il faut aussi noter que les algerois avaient déjà voté pour un candidat d'extrême-droite. Cela ne laisse rien présager de bon...

Pour Massu, la bibliographie est importante de lui ou de nombreux auteurs.

Écrit par : Pataouète | 24 novembre 2010

Yves, tu as eu raison, je n'avais vu que les titres!

Écrit par : noelle | 24 novembre 2010

Camus avait raison : des Français ont tirés sur des Français et ce n'est pas fini. Le drapeau tricolore flotte des 2 cotés.
Si vous visionnez le diaporama vous apercevrez que le seul symbole brandit est celui d'"Occident"

Écrit par : Pataouète | 25 novembre 2010

à demain !

Écrit par : alsacop | 25 novembre 2010

demain c'est vendredi !
;-D

Écrit par : D | 25 novembre 2010

Bonjour,

Réalisateur de documentaires télé, j'essaye de retrouver Pierre Lagaillarde. Quelqu'un a t-il une piste???

Écrit par : d artagnan | 08 février 2011

Bonjour D'Artagnan
et merci d'avoir bien voulu lire et commenter mon Blog.
Si vous avez feuilleté Pataouète vous avez du comprendre que je m'inscris au bord opposé de Lagaillarde. Ce n'est donc pas par moi que vous pourrez avoir de ses nouvelles. Par contre peut-être qu'un de mes lecteur ?
J'espère avoir la possibilité bientôt de visionner votre Film et si mon blog peut contribuer à construire votre scénario j'en serais très heureux !
Donc à bientôt.

Écrit par : Pataouète | 09 février 2011

j'etais en cm2 mais etais partie avec ma mere rejoindre mon pere aux barricades qui ensuite s'est engage au commando alcazar puis a sejoune au camp de st maurice l'ardoise cette epoque a beaucoup marqué ma vie

Écrit par : forcioli | 28 janvier 2013

Bonjour,
A l’issue d’un travail de plusieurs années, voici dégagées certaines pistes d’analyse
de la trajectoire effectivement suivie par Charles de Gaulle :
http://youtu.be/Jo2hIRYoRW0
Je souhaite vivement que cette vidéo puisse toucher un maximum de personnes
en situation d’en tirer matière à réflexion, et, par suite, de ne pas se leurrer
exagérément sur les qualités démocratiques de la loi fondamentale
qui est censée organiser notre vie collective.
Très cordialement,
Michel J. Cuny

Écrit par : Michel J. Cuny | 22 mai 2013

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