03 décembre 2010
Ecoles fermées au Handicap
Des milliers d'enfants handicapés sont privés d'école depuis la rentrée, en septembre dernier. L'Education nationale a cessé de payer leurs « auxiliaires de vie scolaire » (AVS), qui les aident en classe, les assistent à la cantine, les protègent durant la récréation, obligeant les parents à les garder à la maison. En Seine-Saint-Denis, 90 gamins attendent une assistance, 200 autres se désolent dans le Finistère, et une cinquantaine se morfondent dans l'Ain.
De simples exemples, car aucun chiffre sérieux relatif au nombre des laissés-pour-compte en France n'est avancé, tant par les associations que par le ministère. Alors c'est la grande débrouille ; auxiliaires payés directement par les familles, requêtes auprès des tribunaux administratifs, pétitions, protestations par centaines envoyées aux recteurs et aux préfets de Région. « Les familles se battent dans leur coin», explique au "Canard" l'Association des paralysés de France. « Il existe des tensions sur le terrain », a joliment reconnu Laurent Wauquiez, ex-secrétaire d'Etat à l'Emploi, le 9 novembre.
En fait de « tensions », l'enveloppe AVS 2010 est vide. Aucun poste n'est plus créé ni renouvelé, et ceux qui existent sont rognés, une heure par-ci, une heure par-là ...
Depuis la loi du 11 février 2005 sur l'égalité des chances, la scolarisation des handicapés en milieu scolaire "ordinaire " est pourtant un droit garanti par l'Etat. Dans chaque département, une Maison des enfants handicapés confie à sa commission d'experts le soin d'évaluer les besoins d'un enfant. S'il lui faut des heures de soutien, cette autorité en informe l'Education nationale. Charge à elle de fournir sans discussion un auxiliaire à l'enfant: ce n'est pas un souhait mais la stricte application de la loi.
Contrats pas aidés
Mais où le trouver, cet auxiliaire ? Nulle part et un peu partout. Car auxiliaire de vie scolaire n'est pas une profession. « Pas de filière, de diplôme ou de reconnaissance », explique une AVS de Dijon. Ces trois lettres cachent, en fait, une véritable jungle de statuts particuliers, qui allient la précarité d'un CDD à la largesse du smic horaire. Recrutés par Pôle emploi et payés par l'Education nationale, certains auxiliaires sont considérés comme des « assistants d'éducation» - non titulaires - de la fonction publique. D'autres sont en « Contrat aidé ", comme le "contrat d'accompagnement à l'emploi " ou le « contrat unique d'insertion », qui permettent à l'employeur de limiter les coûts. Moyen imparable de décourager les vocations et d'empêcher l'enfant de s'habituer à son accompagnateur.
En 2001, on dénombrait 3 400 auxiliaires rémunérés par l'Education nationale. Huit ans plus tard, 9 728. La demande explose, mais l'intendance ne suit pas. A force de rogner sur les crédits et de jouer sur les statuts, l'Etat s'est mis hors la loi.
« Il est scandaleux qu'un enfant ayant un handicap ne puisse pas être scolarisé », tonnait Sarko à la télé le 2 mai 2007. Larme à l'œil, il avait même ajouté: « Je veux dire à toutes les familles ( ... ) que je ferai une place à chacun de leurs enfants dans les écoles.» Face à lui, toute gauche d'indignation, Ségolène Royal avait hurlé au « summum de l'immoralité politique », offrant à Sarko cette fameuse réplique: « Mme Royal a perdu ses nerfs. »
Le 9 novembre, à Lagnieu (Ain), une mère s'est menottée à la grille de l'école maternelle parce que l'auxiliaire de son fils autiste avait été viré. Encore une qui a perdu ses nerfs?
Texte de Sori Chalandon
07:20 Écrit par Pataouete dans La poulitique, Mes humeurs | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : ecole, handicap