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01 février 2010

L'Algérie : L'Empire défait

 

Algérie : l'Empire défait.

Une méprise française. De 1830 à 1940, Pierre Darmon raconte l'histoire d'un dessein colonial qui a viré au cauchemar.

1940.jpgLa France n'a pas perdu l'Algérie en juillet 1962, à la proclamation de l'indépendance, mais vingt-deux ans plus tôt, en 1940. C'est la thèse audacieuse défendue par Pierre Darmon au fil du millier de pages "d'Un siècle de passions algériennes".

A la veille de la Seconde Guerre mondiale, la misère des campagnes, l'exode rural, la multiplication des bidonvilles, l'augmentation de la population musulmane dans les villes, le triomphe des inégalités et l'immobilisme de la classe politique scellent la disparition de « l'Algérie de papa».

Tout le monde l'ignore alors, sauf quelques esprits inquiets, à l'instar d'Albert Camus décrivant dans un reportage en Kabylie de 1939 le « cortège d'aveugles et d'infirmes, de joues creuses et de loques qui, pendant tous ces jours, m'a suivi en silence ». Sur le terrain politique, le fossé entre musulmans et Européens se traduit par l'éveil du nationalisme algérien, incarné par l'Etoile africaine de Messali Hadj et la radicalisation à droite des pieds-noirs. La Seconde Guerre mondiale accélère la décomposition. « Un peuple vaincu, humilié, occupé, colonisé et incapable de se libérer par ses propres moyens ne peut être un peuple colonisateur », note Pierre Darmon. Les pieds-noirs deviennent subitement inutiles. Lorsque la grandeur de la France dépend de l'empire, tout est permis. Quand ce n'est plus l'espace qui fait la grandeur d'un pays, mais la dissuasion nucléaire, ils sont condamnés à Ia valise ou au cercueil.

Des chapitres de cette somme éclairent des épisodes méconnus ou négligés : la Commune d'Alger, la révolte du bachaga Mokrani, l'explosion antisémite du tournant du siècle ...

L'un des plus novateurs traite de la « catastrophe démographique ». A la fin des années 1860, la mortalité atteint un pic de 17 % et la population totale passe de 2 900 000 habitants à environ 2 100 000 en moins de six ans. Toutes proportions gardées, cela représenterait une perte de 11 millions d'habitants dans la France d'aujourd'hui... Les responsables de cette hécatombe se nomment choléra, dysenterie, paludisme, sécheresse, sauterelles, combats pendant la révolte kabyle, mais aussi famines, pour les « indigènes » et eux seuls. La présence française en Algérie a failli s'achever en moins de trente ans dans un mouroir.

Un siècle de passions algériennes regorge de chiffres, notes, extraits d'archives et de récits de l'époque, parfois d'une étonnante hauteur, comme ceux du colon légitimiste Villacrose ou de l'interprète militaire mulâtre Ismaël Urbain. Pierre Darmon n'ignore rien du salaire journalier, de la production des oliviers, des malheurs des autruches, de la vie en garnison, des effectifs des maisons closes, du taux de remplissage des stations thermales, mais jamais les détails n'altèrent la fluidité du récit.

A vrai dire, on n'attendait pas sur l'Algérie cet historien spécialiste de la variole, du cancer et des malformations physiques, sorti de l'anonymat des chercheurs il y a vingt -cinq ans avec la publication du Tribunal de l'impuissance, récit édifiant des procédures de nullité du mariage aux XVI~ et XVIIIe siècles. Mais l'Algérie, c'est aussi l'enfance de ce fils d'Oran. Il y est retourné mentalement et a su conter avec passion et rigueur cette entreprise hasardeuse sur une terre dont Charles X ne savait que faire après le débarquement de ses troupes, à Sidi-Ferruch, le 14 juin 1830.

  • EMMANUEL HECHT (L'Express)

Un siècle de passions algériennes. Une histoire de l'Algérie coloniale 1830-1940, par Pierre Darmon.

 

07:04 Écrit par Pataouete dans L'Algérie | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : algérie, darmon, empire défait

31 janvier 2010

Un siècle de passions algériennes

 

Un siècle de passions algériennes

 

855404170_L.jpg.gifPierre Darmon

Fayard, 14/10/2009

 

Lorsque les Français débarquent à Sidi-Ferruch, en 1830, ils sont loin de se douter que cette terre inconnue à l'assaut de laquelle ils s'élancent va soulever des tourbillons de passions et devenir, 130 ans durant, l'un des enjeux majeurs de la politique nationale. Et d'abord, que faire d'un pays conquis sur un coup de tête et de dés ? D'un pays où, jusqu'en 1850, la maladie et les guerres dévorent des milliers d'hommes ? Il faut attendre 1870 pour que la formule « l'Algérie c'est la France » s'impose avec force. Les passions françaises y trouvent dès lors un écho exacerbé. Les Français y seront plus français que ceux de métropole, plus patriotes, plus généreux de leur sang ou, le cas échéant, plus antisémites qu'eux. Quant aux Arabo-Berbères, ils ont longtemps attendu, dans un silence brisé par des révoltes sporadiques. On les considérait comme de « grands enfants » assoupis, dominés par le fatalisme et incapables de « s'en sortir » à l'écart de la « mission civilisatrice » de la France. En 1954, le réveil n'en sera que plus brutal. Mais dès 1940, l'Algérie française est morte. Un pays vaincu ne peut plus être une puissance coloniale dans un monde balayé par un mouvement général d'émancipation.

 

Pierre Darmon a croisé les sources, multiplié les points de vue, allié l'analyse de fond économique et sociale au déroulement des événements et au récit des hommes et de la vie quotidienne avec ses bruits, ses couleurs et son atmosphère si particulière. Au fil des pages se dessinent ainsi tous les aspects d'une Algérie ardente et violente, injuste et séduisante, déchirée par les passions mais porteuse d'espérance, de mythes et d'amour.

Demain, la suite, un article de Emmanuel Hecht (l'express)

 

08:11 Écrit par Pataouete dans L'Algérie | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : algérie, darmon