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15 septembre 2010

Le Moutchou

Les Moutchou

Je ne peux terminer cette série sur le Mzab sans vous présenter ceux d'entre-eux qui ont marqué notre jeunesse : les Moutchoux .

A Alger, on n'allait pas chez l'Epicier, pas plus à l'Hyper qui n'existait pas encore, on allait chez le (mon) Moutchou.

Moutchou.jpg

Pour vous parler de ces Moutchoux, je vous propose un texte de Pierre SCHURDEVIN édité sur le site :

http://www.hussein-dey.org/CHRONIQUES/moutchous/moutchous.htm

D'évidence, "le moutchou" faisait partie des figures incontournables dans les quartiers des villes d'Algérie. A noter, au passage, que le mot moutchou provient vraisemblablement de la déformation, vers les années 1870 -80, par les populations Hispaniques des quartiers populaires, de monsieur en moussiou puis en mouchou, pour finir en moutchou ...

Qui se souvient de "son moutchou" ?

     Combien  étaient-ils sur toute l'étendue de la commune d'Hussein-Dey ? Le plus connu de tous était sans nul doute Djelloul, dans la rue de Constantine, mais d'autres aussi avaient leur notoriété dans les quartiers périphériques.

     Ces épiciers, bien avant nos stratèges de la grande distribution, avaient imaginé déjà le concept du groupement d'achat, par le biais d'une centrale commune.

Monsieur LECLERC n'aura donc rien inventé !

     L'agencement de leurs boutiques n'était pas sans rappeler celui des "rhanouts" arabes du bled, mais en plus grand et en plus riche: l'abondance des marchandises, leur engageante présentation, tout contribuait à susciter l'envie d'acheter. C'était encore, dans ce domaine, une technique avant-gardiste.

     Pour ces gens là, économes, le moindre profit n'était, en aucun cas, à négliger; aussi n'hésitaient-ils pas à pratiquer la vente, non pas au détail, mais, on dira, au sous détail. Ainsi les piécettes trouées de deux sous avaient largement cours chez eux. A la fin, à force de thésauriser, cela faisait des "petits paquets", puis des "gros paquets" ...

     Leur mode de vie étriqué, leur ladrerie érigée en dogme faisaient qu'ils étaient plus ou moins déconsidérés auprès des autres communautés. Mais peu leur importait, l'essentiel était le négoce, rien que le négoce.

     Cependant, s'ils avaient pour dénominateur commun cette pingrerie viscérale, on tombera d'accord sur le fait qu'ils étaient d'une nature paisible et n'étaient pas du genre à alimenter la rubrique des faits divers.

     Finalement, tout bien considéré, la rassurante boutique du moutchou, sorte de caverne d'Ali Baba, malgré son aspect miteux, mettait une petite touche pittoresque à notre environnement. C'était, dès l'abord, les rutilances des boîtes de conserve disposées en pyramides ou bien en cônes; c'était ensuite les odeurs d'épices qui se mêlaient à celles des bocaux d'anchois et des tonnelets d'allaches salées. Il y avait aussi, en vrac ou en sacs, les légumes secs: lentilles, haricots, pois chiches, fèves, pois cassés, le tout abritant quelques charançons, voire, çà et là, deux ou trois cafards. Quant aux souris, cela devait se passer la nuit.

     Mais le plus attirant c'était bien sûr le secteur des sucreries où se pavanaient quelques mouches insolentes ayant échappé de peu aux rubans gluants "stalactites écœurantes fixées au plafond". Rappelons-nous ici, s'agissant de mouches, le fameux FLITOX à odeur de pétrole distribué aussi par notre moutchou.

     Et, par-dessus tout ça, de la mystérieuse arrière-boutique, sans doute plus crade que tout ce qu'on peut imaginer, une musique orientale captée on ne sait sur quelle longueur d'ondes par une vieille TSF, en parvenant à nos oreilles, faisait apparaître furtivement, dans nos subconscients, une Shéhérazade opalescente exécutant un danse du ventre, ô combien lascive ...

     Il faut se souvenir également que la confrérie des marchands de beignets faisait aussi partie de ces phratries hermétiques venues du Mzab.

     Tout ce petit Monde doit certainement continuer, encore aujourd'hui, à officier, dans un contexte, bien sûr, tout à fait différent.

Pour autant, s'en porte-t-il mieux ?

Pour terminer ce sujet, je voudrais préciser 2 choses.

Tout d'abord, une thèse voudrait que "l'Arabe du Coin" ouvert en permanence dans toutes nos villes, soit en fait d'origine Mozabite. Je n'ai pas d'élément pour confirmer totalement cette thèse mais si vous en avez…De mes recherches sur le Oueb pour illustrer cette note, il apparait que Moutchou est devenu aujourd'hui un patronyme répandu. Le Moutchou et devenu Monsieur Moutchou.

CP.jpg

Enfin, le Moutchou vivant dans son arrière boutique, ses enfants étaient scolarisés dans l'école du quartier. Ils constituaient donc l'un des rares "Indigènes" à fréquenter nos classes. Sans aucun problème d'intégration sauf lorsqu'il avait l'outrecuidance de décrocher la Première place ce qui est arrivé quelques fois.

07:30 Écrit par Pataouete dans L'Algérie Les Berbères | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : algérie, mzab, moutchou

Commentaires

Copain de Clauzel, je ne me souviens plus de ton nom mais si tu te reconnais !

Écrit par : Pataouète | 15 septembre 2010

Je ne connaissait pas "Monsieur Moutchou." mais tout le monde connait l'épicerie qui reste toujours ouverte! tard le soir et les jours de fêtes! merci à ce monsieur Moutchou

Yves

Si tu pouvais revenir "sur Chabrol" Simone a pris pour elle, le "çà suffit" ?? merci

Écrit par : noelle | 15 septembre 2010

Pour Simone c'est fait ! C'est vrai que souvent on garde le fil d'une conversation que les moins assidus ne comprennent pas toujours.

Écrit par : Z'Yves | 15 septembre 2010

Merci Yves

Écrit par : noelle | 15 septembre 2010

c'est faux, les petits moutchous n'allaient pas à l'école en ville. Ils vivaient au m'zab avec leur mères, et venaient de temps en temps, passer quelques jours dans la magasin, qui ne se souvient pas , du curieux petit moutchou, habillé comme papa?

Écrit par : Bournot | 06 mars 2013

Les commentaires sont fermés.