17 août 2010
Heureux qui Communistes
Avec une belle érudition, l'historienne Annette Wievorka fait revivre les aventures de "Maurice et Jeannette, Biographie du Couple Thorez" (fayard).
Une Histoire d'Amour et une plongée dans l'univers du PCF au temps de Staline.
"Annette WlEVIORKA éclaire sans a priori partisan l'étonnant parcours des Thorez et quelques-unes des énigmes du Parti communiste des années 20 jusqu'à la mort de Maurice, le 11 juillet 1964. Première énigme : comment un ancien mineur et une tisserande miséreuse ont-ils pu se couler si facilement dans le luxe du « paradis» soviétique sans remettre en- question leurs idéaux prolétaires ~ L'auteur rappelle les origines de ces deux enfants du Nord-Pas-de-Calais, lui mineur, elle tisserande, neuvième de douze enfants, qui évoqueront avec nostalgie leur région natale et le P'tit Quinquin, mais qui ne songeront pas un instant à y retourner vivre, lui préférant les palmiers de la Côte d'Azur (des villas dominant la mer cédées par le Parti) et bien sûr les fastueuses datchas de Crimée.
Deuxième énigme, la fidélité à Moscou, malgré tout ... Annette Wieviorka explique que pour Jeannette Vermeersch, qui n'avait connu que la famine, la violence familiale et le licenciement après une grève, l'engagement au Parti était le seul recours. Son premier voyage à Moscou. en
1929, avec une délégation ouvrière des travailleurs du Nord, fut une «révélation ». Partie avec une culotte et une chemise de rechange, la jeune fille - elle avait 19 ans - fut prise en charge par l'Internationale syndicaliste communiste et resta sur place. Dès lors, elle identifia les « progrès de l'humanité soviétique» à sa propre évolution et à sa rencontre amoureuse avec Maurice Thorez à Moscou en 1930. Quand l'amour rejoint la passion politique !
Très différent fut le parcours de Maurice, qui participa aux luttes pour le pouvoir qui faisaient rage au sein de l'appareil du Parti, en écho aux rivalités à la tête de l'Union soviétique pour la succession de Lénine. C'est à la demande de Moscou que Thorez fut élu membre permanent du comité central en 1925. Deux mois plus tard, il rencontrait le « camarade» Staline à Moscou. Par la suite, et tout au long de sa carrière, cet autodidacte, grand lecteur, sut habilement jouer des rouages du pouvoir: « Si Thorez avait réussi à se maintenir dans toutes les directions du PCF depuis 1925, c'est qu'il avait su jouer la bonne carte: celle de la confiance à Staline. » Les voyages à Moscou se multiplièrent. Maurice et Jeannette logeaient dans des hôtels luxueux en pension complète, concerts et théâtres en prime. Les arrestations de 1937 jusque dans leur hôtel? Le chômage, la misère, le système policier? Ils ne voulaient pas les voir: « En toute franchise, dit Jeannette, je m'en moquais, des procès. » Ce qui importait, c'était de « réussir la construction du socialisme ».
Troisième énigme, celle de l'image publique. Déserteur en 1939, réfugié à Moscou avec Jeannette le 8 novembre, après le pacte germano-soviétique*, Maurice échappa pendant cinq années à l'expérience de la guerre. Revenu en France fin novembre 1944, à la faveur d'une grâce amnistiante du général de Gaulle, il devint, avec l'aide de la propagande des camarades, un symbole de la résistance au nazisme. Sa légitimité ne souffrait aucun débat au sein du Parti des « 75000 fusillés» (23 000 ?). A la demande de Staline, il milita désormais pour le retour à l'ordre républicain : « Il est impossible d'approuver la moindre grève. » Il en acquit une stature d'homme d'Etat et devint ministre, vice-président du Conseil, député jusqu'à sa mort. Mais sa croisade pour le « travailler plus » lui valut l'hostilité des mineurs. Par la suite, Thorez ne cessa d'évoluer au gré des mots d'ordre de Staline.
Dernière énigme, enfin, le conservatisme moral de ce couple de révolutionnaires qui avait pourtant vécu en concubinage, un secret bien gardé par le Parti, de 1932 à 1947, date du divorce de Maurice avec Aurore, sa première femme. Jeannette milita pour la défense de la famille, soutint que la femme est avant tout une mère, s'opposa à la contraception, une idée développée par l'impérialisme américain pour détruire la fécondité de la population. Heureusement, il y eut un dissident dans la famille, le fils Paul, qui fit connaître en France les œuvres des opposants russes persécutés (« le salaud », commenta sa mère) et qui s'avoua homosexuel (<< le dégoûtant »)."
Alain Dag'Naud
* Sur les relations du Parti communiste français avec l'occupant allemand en 1940, vient de paraître " L'affaire de "L'Humanité" ., par Sylvain Boulouque, Larousse .
07:04 Écrit par Pataouete dans La poulitique | Lien permanent | Commentaires (4)
Commentaires
Il y a parfois des hasards...
Cette note était prête avant mon départ vers "Parfum de Jazz" et j'avais programmé sa diffusion pour le jour de mon retour. Mardi.
De retour je me rends compte, que nous sommes le 17 aout. Date anniversaire du décès de mon père !
Mon père qui, comme des milliers, des centaines de milliers, des millions fut sympathisant de l'Internationale ouvrière. Communisme en ton nom, combien de couleuvres a avalé la classe ouvrière ?
Salut André !
Écrit par : Z'Yves | 17 août 2010
Salut André!
Et salut Yves!
Pas encore lu en entier l'histoire de Jeannette et Maurice, depuis ce matin, des pannes!
Bon retour Yves et bisous
Écrit par : noelle | 17 août 2010
13 mai 58, Maurice et Jeannette
Voilà, çà remarche! j'ai tout lu... merci Yves
Bonne nuit
Bises
Écrit par : noelle | 17 août 2010
Eh oui "Maurice et Jeannette" ! Mon beau-père était aussi communiste et il est mort sans profondément admettre que le "petit père des peuples" était un tyran ! et que la belle idée communiste avait été dévoyé...Bisous à toi
Écrit par : Laurencel | 17 août 2010
Les commentaires sont fermés.